Pourvu que cette dictature ne touche pas au sexe !
Il arrive toujours ce moment où la sécurité de sa bulle devient étouffante. Ce moment où un pas dans le vide apparaît comme acte de raison. Ainsi, laisse-t-on sa zone de confort pour aller vers l’autre, lui tendre la main, regarder à travers ses lunettes et accorder une oreille attentive à son histoire.
Alors on se rend compte qu’il n’y a qu’une façon d’embrasser la réalité dans sa globalité et qu’un moyen de modifier le destin : le dialogue intéressé.
Si le mot est facile d’utilisation, sa mise en œuvre ne s’inscrit pas dans la même veine. Dialoguer présuppose un minimum de cultures, de méthodes et de capacité d’élaboration de sa pensée. Voilà l’un des talons d’Achille de la génération à laquelle j’appartiens.
Depuis que certains journaleux et politiciens m’amènent à douter de notre appartenance à la même espèce qu’un Henry Christophe, un Steeve Jobs, un Einstein, un Kagame pour ne citer que ceux-là, j’ai arrêté de prendre ma dose quotidienne de « nouvelles ». La frontière était devenue trop mince entre l’information, la propagande, l’incontinence verbale et la promotion de la médiocratie.
Mais à la faveur de la dictature annoncée et programmée pour le mois de janvier 2015, il m’a paru important de surseoir à mon autocensure et de rencontrer quelques jeunes dans la perspective de recueillir leurs avis.
Je supposais déjà, vu l’accueil triomphal indéfectiblement accordé aux trivialités, qu’une tranche trop importante de notre jeunesse ne s’adonnerait qu’aux banalités. Mais je voulais quand même mettre en doute l’évidence et évaluer combien nous sommes vraiment réfractaires à la science, à la décence, au patriotisme et à l’engagement citoyen. La réponse a été sans équivoque : « Que le pays crève, que la dictature revienne, pourvu qu’on ne touche pas à notre libertinage et nos comportements sexuels dangereux et irresponsables ! »
Ce n’est pas le mal-développement qui détruit les peuples mais l’absence de mémoire collective et la fracture générationnelle. C’est à tort qu’on assimile le jeune âge à l’effervescence pulsionnelle. Dans un pays dévasté comme le nôtre, la jeunesse devrait être cette catégorie qui ne s’autorise ni désespoir ni répit. Nous ne devons pas nous permettre le suicidaire loisir de ne mobiliser que nos hanches. Aussi devons-nous nous arrêter de nous emballer dans des niaiseries dignes des périodes obscures de la préhistoire. L’Internet est source de richesses et de connaissances, nous gagnerons davantage à y effectuer des recherches et de créer des réseautages utiles plutôt que de rendre célèbres des cancres heureux et de partager des photos et vidéos pornographiques.
Le chaos est à nos portes. Nos destructeurs sont à l’œuvre. Ils ont besoin que nous nous confondons à la nullité pour exécuter leurs sales besognes et assouvir leurs bas instincts. Aujourd’hui, je lance un appel solennel à la frange encore récupérable de la jeunesse. Dépassons les individualités, réunissons-nous, soyons enrichis de nos différences, convergeons nos forces, proposons un plan, et travaillons à sa réalisation comme si nous étions immortels ! Soyons les dignes défenseurs de la liberté et de la dignité humaine ! Et rappelons-nous que la terre est sans cesse mouvante autour de la fosse qu’on creuse pour enterrer la liberté, les fossoyeurs y tombent toujours !
Dr Valéry MOISE
Email : lyvera7@yahoo.fr
Commentaires